Fil rouge entre la maison et le jardin
Sabine était tellement sous le charme du mur rouge dans son petit jardin de ville qu’elle a transformé toute sa maison, jusqu’à la terrasse couverte, en fonction de celui-ci. Ici, on n’a pas utilisé de fleurs. Place à la couleur!
Une petite place tranquille entourée de façades brugeoises traditionnelles, à l’ombre des remparts de la ville. Rien ne laisse deviner que derrière ces façades se cachent des maisons tendance et des lofts design. Seule une façade hypertrendy renvoie à ce qui était autrefois un bâtiment industriel. « Quand nous avons acheté notre maison, il y a dix ans environ, cette ferblanterie était toujours en activité », indique Sabine. « Vous ne pouvez pas vous imaginer le boucan que ça faisait ! » Aujourd’hui, seules une immense cheminée et quelques photos rappellent cette période. La maison de Sabine, tout comme l’usine, a connu une rénovation radicale. Les petites pièces sombres à l’avant de la maison ont été transformées en un espace lumineux tout en longeur. Mais ce sont surtout les panneaux rouges dans le fond du jardin qui attirent l’attention. « L’idée est venue d’Olivier, l’architecte paysagiste. Nous la trouvions tellement géniale que nous avons littéralement pris le rouge comme… fil rouge de la maison. » L’un des murs de la salle de séjour a ainsi été peint en rouge et de petits accessoires rouges, comme des coussins moelleux et une lampe, agrémentent le décor majoritairement blanc.
Perspectives plus grandes
Le rouge est à peu près la seule couleur détectable dans le jardin. Entre les murs blanchis à la chaux ne domine pour toute autre couleur que le vert. Mais il n’en a pas toujours été ainsi. « Ma première création (personnelle) s’inspirait du style anglais, avec des fleurs à profusion et des plantes de toutes sortes. Nous avons rencontré Olivier par hasard, grâce à des amis, et il nous a proposé de façon informelle de créer un nouveau jardin. Il venait tout juste de commencer à travailler… Nous étions ses huitièmes clients. Sa proposition était très austère et très différente de mon jardin fleuri, mais ça a collé et nous nous sommes engagés avec lui. Quand je lui touchais un mot de fleurs éventuelles, il répondait avec fermeté : ‘Si tu veux des fleurs dans ton jardin, il va falloir changer de créateur.’ Heureusement, nous ne l’avons pas fait ! » Le principal objectif d’Olivier était de créer l’illusion d’un jardin plus grand que ses neuf mètres sur six : « J’y suis parvenu en plaçant contre le mur du fond une double rangée de charmes, qui forment un gros bloc. Les bords en biseau des haies de buis mesurant trois mètres de long agrandissent l’espace. Le buis est une plante traditionnelle, mais en le taillant en trapèze, et en agençant ça et là des plantes vivaces, cela donne un résultat très moderne. » En hiver, les tiges brunies des plantes disparaissent entre les buis et le jardin garde un aspect vert et net. Trois rosiers grimpants – un mélange de ‘New Dawn’ et de ‘Blanche Neige’ (syn. ‘Landisney’) – créent des lignes verticales sur les murs latéraux, agrandisant par là les perspectives du jardin.
Déjeuner sur les toits de Bruges
Les matériaux ont sciemment été choisis pour leur sobriété : une terrasse longue et étroite en pavés de pierre bleue et des bandes de gravier, que d’autres pavés de pierre bleue interrompent en dessinant de fines lignes diagonales – une astuce optique de plus pour donner plus profondeur au jardin. « Il y a deux ans, nous avons demandé à Olivier d’imaginer une terrasse supplémentaire sur le toit. Mon mari, Alex, souhaitait pouvoir déjeuner de bon matin au soleil. Or, dans notre petit jardin en contrebas, il ne brille qu’aux environs de midi. » Le résultat se caractérise une fois de plus par une grande sobriété ponctuée de quelques détails bien pensés. Ainsi le sol en bois bilinga dont les planches de trois largeurs différentes s’entrecroisent. « Cela rend la terrasse plus attrayante », glisse Olivier. Le plancher de la terrasse est percé de plusieurs grandes fenêtres laissant filtrer la lumière vers l’étage inférieur. Pour garder un lien avec le jardin, Olivier a imaginé un mur en mosaïque rouge, qui sert en même temps de séparation avec les voisins. « Nous trouvions important de ne pas être dérangés, mais également de ne pas perturber l’intimité de nos voisins. L’eau contre le mur fonctionne comme une sorte de barrière dissuasive qui empêche d’aller voir ce qui se passe derrière. » Quelques plantes annuelles et un Agapanthus en pot apportent des touches de couleurs. Très vite, la nouvelle terrasse est devenue l’endroit préféré d’Alex et Sabine. « Même au cœur de l’hiver, nous venons y profiter du soleil avec un gros pull. On y a une vue magnifique sur les toits (rouges !) et les tours de Bruges. Le soleil y donne du matin au soir et les voisins ne nous dérangent pas. C’est tout simplement le pied ! » De plus, avec ses douze mètres de long, la terrasse se prête idéalement aux petites fêtes entre amis…
Nature miniature
« Ce qui me manque ? Rien, en fait. Nous adorons notre jardin et cet endroit. J’ai vécu à peu près toute ma vie dans cette région et Alex, qui est entrepreneur agricole en Flandre zélandaise, aime par contraste habiter en ville. Peut-être qu’un jour, nous introduirons un peu plus d’eau dans le jardin. J’étais plutôt contre cette idée à cause de l’entretien, mais aujourd’hui, elle me plaît, cette petite mare avec l’eau qui clapote et qui réfléchit la lumière. » Les propriétaires ne manquent pas de contacts avec la nature. « Vous seriez étonné du nombre d’animaux que nous voyons passer dans notre minijardin. Cette semaine, nous avons reçu la visite d’un héron bleu ; en été, on voit voler les chauves-souris et le jardin a déjà accueilli une chouette effraie. »
Texte : Laurence Machiels - Jardins